Les glissements de terrain au Québec : risques, couverture d’assurance et programmes gouvernementaux

May 23 / Martin Desloges
Cette semaine, un important glissement de terrain à Sainte-Monique a rappelé à quel point ce phénomène naturel peut bouleverser la vie des Québécois. Les images frappantes et les témoignages, comme celui du propriétaire sauvé in extremis, soulignent la gravité de ces événements.

Mais au-delà du choc, se pose une question cruciale : comment sommes-nous protégés face à de tels sinistres?

Quelques glissements de terrain marquants au Québec dans les dernières années

Le Québec a malheureusement connu plusieurs épisodes de glissements de terrain majeurs au cours des dernières années, rappelant la vulnérabilité de certaines régions face à ce type de catastrophe naturelle. Parmi les événements les plus marquants :

- La Baie, Saguenay (1996) : Lors du déluge du Saguenay, de nombreux glissements de terrain ont été recensés, causant des dommages importants à l’infrastructure et à des habitations.

- Saint-Jude (2010) : Ce glissement de terrain tragique a coûté la vie à quatre personnes et détruit une résidence, mettant en lumière les risques liés aux sols argileux de la région.

- Saint-Alban (2016) : Un impressionnant glissement de terrain a déplacé une grande masse de terre, forçant l’évacuation de plusieurs résidences et coupant des routes.

- Saint-Fabien (2021) : Un glissement de terrain a endommagé des routes et menacé des habitations, nécessitant l’intervention rapide des autorités.

Ces exemples démontrent que les glissements de terrain sont des phénomènes récurrents au Québec, avec des conséquences parfois dramatiques pour les communautés touchées.

Les risques associés aux glissements de terrain

Les glissements de terrain représentent un danger naturel important, particulièrement dans plusieurs régions du Québec où la géologie et le climat favorisent ce type d’événement. Ces mouvements soudains de masses de terre, de boue ou de roches peuvent survenir à la suite de fortes précipitations, de la fonte des neiges, d’inondations, ou encore de travaux humains qui déstabilisent le sol.

Facteurs de risque principaux :
  • Sols argileux sensibles : De vastes territoires du Québec, comme la vallée du Saint-Laurent, sont composés de sols argileux très sujets à la liquéfaction et aux glissements.
  • Précipitations abondantes ou extrêmes : Les épisodes de pluie intense ou prolongée saturent le sol en eau, réduisant sa cohésion et augmentant le risque de glissement.
  • Pentes abruptes et déboisement : Les terrains en pente, surtout lorsqu’ils sont fragilisés par le déboisement ou des travaux de terrassement, sont plus vulnérables.
  • Activités humaines : Les constructions, routes, et autres aménagements peuvent altérer l’équilibre naturel du terrain et déclencher des glissements.

    Conséquences possibles  

  • Destruction de bâtiments et d’infrastructures : Maisons, routes, ponts et réseaux publics peuvent être endommagés ou complètement détruits en quelques instants.
  • Évacuations d’urgence : Les habitants des zones touchées doivent parfois quitter leur domicile rapidement, parfois sans pouvoir récupérer leurs biens.
  • Perte de vie humaine : Bien que rare, la perte de vies humaines demeure un risque réel lors d’événements majeurs.
  • Perturbations économiques et sociales : Les glissements de terrain peuvent isoler des communautés, interrompre les services essentiels et engendrer des coûts importants pour les particuliers et les collectivités.
  • Impacts environnementaux : Ces phénomènes modifient les paysages, détruisent des habitats naturels et peuvent entraîner la pollution des cours d’eau.

Prévention et vigilance
La surveillance des zones à risque, l’entretien des infrastructures et la sensibilisation du public sont essentiels pour réduire l’impact des glissements de terrain. Il est important pour les résidents des secteurs vulnérables de rester informés et de suivre les consignes des autorités en cas d’alerte.

Conseils pour reconnaître les signes avant-coureurs d’un glissement de terrain

Être attentif à certains signes peut permettre d’agir à temps et de limiter les conséquences d’un glissement de terrain.

Voici quelques indicateurs à surveiller, surtout après de fortes pluies ou dans les zones à risque :
  • Apparition de fissures inhabituelles dans le sol, les fondations ou les murs.
  • Déformation ou affaissement soudain d’un terrain, d’une route ou d’un trottoir.
  • Portes et fenêtres qui se ferment difficilement, ou qui semblent « coincées » sans raison apparente.
  • Mouvements ou inclinaisons anormales de clôtures, de poteaux ou d’arbres.
  • Bruits inhabituels, comme des craquements ou des grondements provenant du sol.
  • Apparition soudaine de sources d’eau, de boue ou de débris sur une pente ou un terrain plat.

En cas de doute ou d’observation de ces signes :
  • Évacuez la zone si votre sécurité est en jeu.
  • Prévenez immédiatement les autorités locales ou la Sécurité publique.
  • Évitez d’approcher les zones touchées ou instables.

La vigilance et la rapidité d’action peuvent faire toute la différence lors d’un glissement de terrain.

La couverture d’assurance : un angle mort majeur  

Contrairement à d’autres catastrophes naturelles (incendies, dégâts d’eau), les dommages causés par les glissements de terrain ne sont généralement pas couverts par les assureurs privés au Québec. Cette exclusion figure dans la plupart des contrats d’assurance habitation et commerciale, laissant les sinistrés sans recours traditionnel après un tel événement. Il est aussi important de souligner que les frais découlant d’un ordre d’évacuation — par exemple, les coûts d’hébergement temporaire, de repas ou de relocalisation — ne sont habituellement pas remboursés par les assureurs privés.

Ainsi, lors d’un glissement de terrain, les résidents concernés pourraient devoir assumer des dépenses importantes de leur poche, en attendant la mise en place d’une aide gouvernementale.

Les programmes gouvernementaux de protection 

Face à l’absence de couverture par les assureurs privés pour les dommages causés par les glissements de terrain, le gouvernement du Québec a mis en place des programmes d’aide financière pour soutenir les sinistrés. Ces programmes sont principalement administrés par le ministère de la Sécurité publique (MSP).
Les objectifs principaux sont d’offrir un soutien financier aux particuliers, entreprises et municipalités touchés par des catastrophes naturelles non assurables, de faciliter la réparation, la reconstruction ou la relocalisation des bâtiments endommagés, et d’aider à couvrir certains frais d’urgence et de subsistance.

Fonctionnement général du programme d’aide financière lors de sinistres :

1. Déclaration et évaluation
Après un événement, les municipalités évaluent les dommages et déclarent la situation au ministère. Les sinistrés doivent remplir une demande d’aide, souvent avec l’appui de leur municipalité.

2. Admissibilité
L’aide s’adresse principalement aux propriétaires de résidences principales, aux locataires, aux entreprises et aux municipalités. Les dommages doivent être causés directement par le sinistre (dans ce cas, un glissement de terrain). Les pertes assurables (celles qui auraient pu être couvertes par une assurance régulière) ne sont généralement pas admissibles.

3. Type d’aide accordée
Compensation partielle pour les dommages matériels non assurés : remboursement d’une partie des coûts de réparation, de remplacement ou de relocalisation des biens endommagés.

  • Frais d’hébergement temporaire et de subsistance : aide pour les dépenses encourues à la suite d’un ordre d’évacuation, comme l’hébergement, les repas et les déplacements.
  • Assistance pour la relocalisation : dans les cas où la résidence est déclarée inhabitable, une aide peut être accordée pour l’achat ou la location d’un nouveau logement.
  • Soutien aux municipalités : remboursement de certaines dépenses liées à la gestion de la crise, au nettoyage, à la remise en état des infrastructures publiques, etc.

4. Limites et exclusions
L’aide n’est pas destinée à compenser la totalité des pertes subies, mais à offrir un soutien minimal pour permettre aux sinistrés de se rétablir. Certains biens ou améliorations (par exemple : piscines, clôtures, garages détachés) sont souvent exclus. Les délais de traitement et de versement peuvent varier selon la gravité du sinistre et le nombre de demandes.

Ressources et informations
Les citoyens peuvent consulter le site du ministère de la Sécurité publique du Québec pour obtenir des détails sur les programmes en vigueur, les formulaires à remplir et les coordonnées pour l’assistance. Il est recommandé de conserver tous les documents, factures et preuves de dommages pour faciliter le traitement de la demande.

En résumé, même si l’aide gouvernementale ne remplace pas une assurance complète, elle constitue un filet de sécurité essentiel pour les victimes de glissements de terrain au Québec.

Conclusion  

Les récents glissements de terrain, comme celui de Sainte-Monique, rappellent l’importance d’être informé sur les risques et sur les limites de la couverture d’assurance. En tant que citoyens et professionnels de l’assurance, il est essentiel de sensibiliser sur la réalité de ces exclusions et de bien comprendre les mécanismes d’aide gouvernementale disponibles.